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26/04/2015

Privation de soleil et troubles du voisinage

Cet arrêt juge que la privation d'ensoleillement est un trouble du voisinage :

 

"Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M et Mme X... ont fait l'acquisition en 1992 de leur maison d'habitation, contiguë à un immeuble de deux étages ; que cet immeuble et la parcelle sur laquelle il était bâti ont été achetés par la société Maisons saines-air et lumière (la société) ; que celle-ci a fait détruire l'immeuble fin 1994, puis ayant obtenu en 1996 un permis de construire, a fait bâtir sur cet emplacement un nouvel édifice comprenant sept étages, d'une hauteur de 24 mètres ; que M et Mme X... s'étant plaints de désordres et troubles anormaux de voisinage apparus depuis cette nouvelle construction, un tribunal de grande instance a accueilli leur demande tendant à obtenir de la société la cessation de ces troubles et sa condamnation à les indemniser de leurs préjudices ; 

 

Attendu que le second moyen du pourvoi n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ; 

 

Mais sur le premier moyen : 

 

Vu le principe selon lequel nul ne peut causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; 

 

Attendu que pour débouter M. et Mme X... de leur demande de dommages-intérêts pour préjudice tant matériel que moral et de jouissance, l'arrêt énonce que la diminution de l'ensoleillement ou de l'éclairement résultant de la construction d'un immeuble en limite de la propriété voisine constitue la perte d'un avantage nécessairement précaire au centre d'un tissu urbain particulièrement dense ; que les clichés photographiques remontant à une période antérieure à l'édification de l'immeuble contigu de huit niveaux mettent en évidence que ce secteur avait déjà perdu depuis de nombreuses années son caractère de zone pavillonnaire ; que le désagrément subi qui a résulté de l'édification de cet immeuble n'a pas constitué un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage ; 

 

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle retenait qu'il résultait des conclusions de l'expert judiciaire et des observations de l'architecte de M. et Mme X..., que la construction d'un immeuble de 24 mètres de hauteur que prohibe le plan d'occupation des sols (POS) applicable depuis l'année 2000, au lieu et place d'un précédent immeuble de deux étages, privait le jardin de tout ensoleillement possible et transformait la partie sud de leur pavillon en une espèce de puits sans vue ni lumière, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le principe susvisé ; 

 

PAR CES MOTIFS : 

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. et Mme X... de leur demande relative à la réparation de la perte d'ensoleillement et de lumière, l'arrêt rendu le 25 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ; 

 

Condamne la société Maisons saines-air et lumière aux dépens ; 

 

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Maisons saines-air et lumière ; 

 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; 

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.

 

 

MOYENS ANNEXES au présent arrêt 

 

Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X... 

 

 

Il est fait grief à la décision attaquée infirmative sur ce point d'avoir écarté la demande de dommages-intérêts pour préjudices tant matériel, que moral et de jouissance, des époux X..., à l'encontre de la société MAISONS SAINES-AIR ET LUMIÈRE, à raison de la perte d'ensoleillement et d'éclairement ; 

 

 

AUX MOTIFS notamment QUE ; 

 

« I. Sur la demande de dommages-intérêts pour trouble anormal de voisinage 

Considérant que le droit pour le propriétaire de jouir de son bien de la manière la plus absolue, sauf usage prohibé par la loi ou les règlements, est limité par l'obligation de ne causer à la propriété d'autrui aucun dommage dépassant les inconvénients normaux du voisinage ; 

Considérant que c'est au regard du secteur dans lequel sont édifiées les constructions litigieuses qu'il convient d'apprécier si le trouble invoqué excède ou non les inconvénients normaux du voisinage ; 

Considérant qu'en l'occurrence, aux termes de son rapport d'expertise du 12 juillet 2003, Monsieur Jean-Marc Y... a notamment constaté, à la suite de la visite des lieux effectuée par lui le 8 décembre 2000, que le jardin arrière de la propriété des époux X... est privé de tout ensoleillement possible compte tenu de la présence de l'immeuble de 8 niveaux (24 mètres de hauteur environ) réalisé par la société MAISONS SAINES-AIR ET LUMIÈRE suivant permis de construire accordé le 25 octobre 1996 ; 

Considérant que les observations de l'expert judiciaire corroborent celles de Monsieur Nicolas Z..., architecte, lequel, invité par les époux X... à donner son avis sur les nuisances résultant de la construction de l'immeuble sur le terrain voisin de leur propriété, a, selon rapport en date du 7 mai 1999, relevé que le mur pignon du nouveau bâtiment s'élève à environ 24 mètre au-dessus du niveau du sol et transforme ainsi toute la partie sud de la propriété des intimés « en une espèce de puits sans vue et sans lumière » ; 

Mais considérant que la diminution de l'ensoleillement ou de l'éclairement résultant de la construction d'un immeuble en limite de la propriété voisine constitue la perte d'un avantage nécessairement précaire au centre d'un tissu urbain particulièrement dense ; 

Considérant qu'en l'espèce, il est acquis aux débats que la maison des époux X... est située à quelques kilomètres du centre de PARIS et au sein d'une agglomération urbaine caractérisée par une très forte densité de logements et de bureaux ; 

Considérant qu'il apparaît également que leur immeuble, distant de seulement 500 mètres environ du centre du quartier d'affaires de LA DEFENSE, est situé dans un environnement privilégiant de manière prédominante l'habitat collectif ; 

Considérant qu'au demeurant, les clichés photographiques remontant à une période antérieure à l'édification de l'immeuble contigu de huit niveaux mettent en évidence que ce secteur de COURBEVOIE avait déjà perdu depuis de nombreuses années son caractère de zone pavillonnaire ; 

Considérant qu'au surplus, il doit être observé que, lorsque les intimés en ont fait l'acquisition courant 1992, leur maison ne bénéficiait pas d'un ensoleillement total, puisqu'elle jouxtait un immeuble collectif de deux étages construit sur l'emplacement de la construction litigieuse ; 

Considérant que, dès lors, compte tenu de la situation de leur bien dans un quartier fortement peuplé et en voie d'expansion, le désagrément subi à raison de la diminution d'éclairement et d'ensoleillement qui a résulté de l'édification de cet immeuble contigu n'a pas constitué un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage ; 

Considérant qu'il y a donc lieu, en infirmant le jugement déféré, de débouté Monsieur et Madame X... de leur demande de dommages-intérêts sur ce fondement (...) ; 

Considérant que, ainsi que le relève Monsieur A... aux termes de son rapport d'expertise judiciaire, les seuls préjudices immatériels susceptibles d'ouvrir droit à réparation en faveur de Monsieur et Madame X... ont trait d'une part aux ennuis créés par l'écroulement du plancher, d'autre part à la présence d'humidité persistante ; 

Considérant qu'il a déjà été mis en évidence que l'écroulement du plancher a pour origine les infiltrations des eaux de pluie dans la maison des intimés, sans que la société MAISONS SAINES-AIR ET LUMIÈRE puisse être tenue pour responsable de ces infiltrations, lesquelles résultent pour l'essentiel de l'état de dégradation avancée de la souche de cheminée ; 

Considérant qu'au regard de ce qui précède, la demande d'indemnisation pour trouble de jouissance et préjudice moral, en tant qu'elle se rattache aux désordres ayant affecté une partie du logement occupé par les époux X... entre novembre 1999 et novembre 2004, ne peut prospérer et doit donc être écartée ; 

Considérant que, par ailleurs, dès lors que la preuve n'est pas rapportée d'un lien de causalité entre les travaux entrepris par la société appelante et les désordres liés au refoulement de la chaudière, les intimés ne sauraient davantage faire supporter par la société appelante les conséquences dommageables de la privation de chauffage endurée par eux durant la période comprise entre les mois de décembre 2004 et février 2006 ;

Considérant qu'en définitive, Monsieur et Madame X... sont seulement fondés à obtenir la réparation du trouble de jouissance ainsi que du préjudice moral consécutifs aux désordres ayant affecté le mur du salon postérieurement au mois d'avril 2004 ; 

Considérant qu'en fonction des éléments d'appréciation dont dispose la Cour, ces divers chefs de préjudice seront suffisamment indemnisés par l'allocation aux époux X... d'une indemnité égale à 5. 000 € toutes causes confondues ; » 

 

1°) ALORS QUE nul ne peut causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; que si les juges du fond apprécient souverainement l'existence d'un tel trouble, c'est à la condition qu'ils tirent les conséquences légales de leurs constatations tant au regard de l'importance du trouble que de la situation des lieux ; qu'en faisant leurs les conclusions tant de l'expert judiciaire que de l'architecte des époux X... desquelles il résultait que la maison des époux X... était désormais privée de tout ensoleillement possible et transformée en une espèce de puits sans vue et sans lumière mais considéré cette situation comme non anormale dans un " environnement privilégiant de manière prédominante l'habitat collectif ", la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé par refus d'application le principe général du droit susvisé ; 

 

2°) ALORS QUE dans leurs conclusions d'appel (p. 7 in fine et p. 8), les exposants faisaient valoir, par référence à l'expertise judiciaire de Monsieur Y..., que cette situation n'avait été rendue possible que parce que « cette construction a été réalisée sur la base des règles générales d'urbanisme car le plan d'occupation des sols avait été annulé par le Tribunal administratif en mars 1993 " et qu'elle ne le serait plus désormais vu " (qu) un nouveau plan d'occupation des sols a été en vigueur en mai 2000 qui prévoit dans son article 7. 1. 1. 2 (que) toutefois les constructions en limite séparative sont autorisées, soit si elles s'adossent à une construction en bon état de dimensions égales ou supérieures existant sur le terrain voisine et si elles s'insèrent dans les héberges des bâtiments existants, soit si elles ne sont pas affectées à l'habitation ou à l'activité et que leur hauteur totale ne dépasse pas 3, 50 m. en limite séparative ; (que)... cette construction ne serait plus possible depuis mai 2000 et gue la commune a un souci de cohérence dans la hauteur des constructions entre elles » ; qu'en ignorant purement et simplement ce moyen des conclusions d'appel des exposants duquel il ressortait que l'environnement de leur pavillon n'était pas destiné à comporter un immeuble de l'importance de celui réalisé par la société MAISONS SAINES pour en déduire que ce secteur privilégiait l'habitat collectif, les juges d'appel n'ont pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile. 

 

 

SECOND MOYEN DE CASSATION 

 

Il est fait grief à la décision partiellement infirmative attaquée d'avoir écarté la demande de dommages-intérêts des exposants relatifs aux désordres consécutifs aux infiltrations provenant de la souche de leur cheminée, à l'origine de l'effondrement du plafond de leur salon (plancher du 1er étage) et de l'évacuation de leur chaudière, ainsi que d'indemnisation des préjudices de jouissance et moral afférents ; 

 

AUX MOTIFS QUE ; 

 

« II. Sur les désordres afférents à la construction litigieuse 

 

1. Sur les désordres provenant de la souche de cheminée : 

Considérant qu'au soutien de leur demande en paiement de la somme de 9. 927, 55 € TTC, correspondant au montant des travaux de réfection, Monsieur et Madame X... font valoir que, postérieurement à la pose des conduits en inox effectuée par la société MAISONS SAINES-AIR ET LUMIÈRE, diverses infiltrations sont apparues à l'intérieur de leur maison, provoquant, entre autres, l'effondrement d'une partie du plafond du salon en avril 2004 ; 

Considérant qu'à cet égard, aux termes de son rapport d'expertise, Monsieur Y... attribue la cause des infiltrations subies par les époux X... pour l'essentiel à l'état déplorable des enduits de ravalement (sur trois faces) de la souche de cheminée, ces enduits ayant été réalisés sans le moindre professionnalisme dès lors que les parties verticales ont été laissées sans protection contre les eaux de pluie ; 

Mais considérant qu'il n'est pas contredit par les éléments de la cause que ces enduits n'ont pas été réalisés par la société appelante, celle-ci s'étant contentée de faire exécuter par la société NOVALEX un enduit de ravalement sur la face de la souche de cheminée située côté immeuble..., sans que la qualité de cet enduit ait été mis en cause ; 

Considérant que, pour sa part, Monsieur A..., désigné en tant qu'expert par ordonnance du 11 janvier 2005 à l'effet de déterminer la nature et l'importance des désordres apparus postérieurement au 19 avril 2004, a 

constaté l'aggravation des infiltrations ayant affecté l'habitation des intimés, à l'origine de l'effondrement d'une partie du plafond de leur séjour ; 

Considérant qu'il a estimé que ces désordres sont la conséquence de l'état désastreux de la cheminée, laquelle n'avait pas fait l'objet de réparations avant celles réalisées en novembre 2004 à l'initiative de Monsieur et Madame X... ; 

Considérant qu'il a également exclu que les infiltrations puissent trouver leur origine dans la pose par la société MAISONS SAINES-AIR ET LUMIÈRE du tuyau en inox prolongeant la cheminée de la maison des intimés ; 

Considérant qu'au demeurant, la société appelante justifie avoir proposé la réalisation de divers travaux d'étanchéité et de ravalement aux termes d'un projet de convention qu'elle avait soumis aux époux X... et auquel ces derniers n'ont toutefois pas cru devoir donner suite ; 

Considérant qu'au surplus, il s'infère des rapports d'expertise produits aux débats que cette souche de cheminée souffrait depuis longtemps d'un défaut manifeste d'entretien dont la société MAISONS SAINES-AIR ET LUMIÈRE ne saurait être tenue pour responsable ; 

Considérant qu'en toute hypothèse, dans la mesure où rien n'autorise à imputer de manière certaine l'origine des infiltrations à l'exécution des travaux de pose des conduits en inox entrepris par la société NOVALEX à la demande de la société MAISONS SAINES-AIR ET LUMIÈRE, il convient, en infirmant le jugement entrepris, de débouter Monsieur et Madame X... de leur demande en paiement de la somme de 9. 927, 55 € ; 

 

2. Sur le demande de remplacement de la chaudière : 

Considérant que Monsieur et Madame X... sollicitent le versement de la somme de 5. 798, 99 € TTC, correspondant à l'installation d'une chaudière adaptée ; 

Mais considérant qu'il ne ressort nullement des documents produits aux débats que les travaux réalisés à l'initiative de la société MAISONS SAINES-AIR ET LUMIÈRE auraient rendu nécessaire le remplacement de la chaudière des époux X... ; 

Considérant que, dès lors, ces derniers ne sont pas fondés à solliciter de la société appelante qu'elle supporte la charge financière d'un tel remplacement, suggéré de manière alternative par Monsieur A... aux termes de son rapport d'expertise (...) ; 

 

III. Sur le trouble de jouissance et sur les demandes annexes : 

 

Considérant que, ainsi que le relève Monsieur A... aux termes de son rapport d'expertise judiciaire, les seuls préjudices immatériels susceptibles d'ouvrir droit à réparation en faveur de Monsieur et Madame X... ont trait d'une part aux ennuis créés par l'écroulement du plancher, d'autre part à la présence d'humidité persistante ; 

Considérant qu'il a déjà été mis en évidence que l'écroulement du plancher a pour origine les infiltrations des eaux de pluie dans la maison des intimés, sans que la société MAISONS SAINES-AIR ET LUMIÈRE puisse être tenue pour responsable de ces infiltrations, lesquelles résultent pour l'essentiel de l'état de dégradation avancée de la souche de cheminée ; 

Considérant qu'au regard de ce qui précède, la demande d'indemnisation pour trouble de jouissance et préjudice moral, en tant qu'elle se rattache aux désordres ayant affecté une partie du logement occupé par les époux X... entre novembre 1999 et novembre 2004, ne peut prospérer et doit donc être écartée ; 

Considérant que, par ailleurs, dès lors que la preuve n'est pas rapportée d'un lien de causalité entre les travaux entrepris par la société appelante et les désordres liés au refoulement de la chaudière, les intimés ne sauraient davantage faire supporter par la société appelante les conséquences dommageables de la privation de chauffage endurée par eux durant la période comprise entre le mois de décembre 2004 et février 2006 ; 

Considérant qu'en définitive, Monsieur et Madame X... sont seulement fondés à obtenir la réparation du trouble de jouissance ainsi que du préjudice moral consécutifs aux désordres ayant affecté le mur du salon postérieurement au mois d'avril 2004 ; 

Considérant qu'en fonction des éléments d'appréciation dont dispose la Cour, ces divers chefs de préjudice seront suffisamment indemnisés par l'allocation aux époux X... d'une indemnité égale à 5. 000 € toutes causes confondues » ; 

 

ALORS QUE les exposants, tout en ne déniant pas les constatations de l'expert Y..., mettaient en cause dans leurs écritures non seulement les conduits en inox installés par la société MAISONS SAINES mais encore la solution technique d'ensemble conçue par cette société et mise en place sans leur accord ; qu'en n'examinant nullement l'incidence de ce dernier point, les juges d'appel ont entaché leur décision d'un défaut manifeste de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile."