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21/01/2009

Les pouvoirs du Maire et la tour antigel Eole



Voici un arrêt qui nie au Maire le droit d’interdire à un agriculteur de « faire fonctionner sa tour antigel Eole » :

 

« Vu la requête, enregistrée le 3 août 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 04MA01701, présentée par la selarl cabinet Autric- de Lepineau, avocat, pour M. Elian X, élisant domicile ... ; M. X demande à la Cour :

 

1°/ d'annuler l'article 1er du jugement n° 9903673 du 3 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 25 mars 1999 par laquelle le maire de Venasque lui a interdit de faire fonctionner sa tour antigel Eole jusqu'à ce que les résultats des mesures sonométriques soient connus ;

 

 

2°/ d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

 

 

3°/ de condamner la commune de Venasque à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

 

 

 

 

Vu les autres pièces du dossier ;

 

 

Vu le code général des collectivités territoriales ;

 

 

Vu le code de la santé publique ;

 

 

Vu le décret n° 95-408 du 18 avril 1995 ;

 

 

Vu le code de justice administrative ;

 

 

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

 

 

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 janvier 2006 :

 

 

- le rapport de M. Pocheron, premier conseiller ;

 

 

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

 

 

Considérant que M. X, exploitant de vignes et de vergers de cerisiers à Venasque (Vaucluse) a, pour protéger ses plantations du gel, procédé le 2 mars 1999 à l'installation d'une éolienne antigel et l'a mise en fonctionnement quelques jours plus tard ; que, saisi de plaintes de voisins, et après s'être rendu sur les lieux, le maire de Venasque a, le 25 mars 1999, pris un arrêté interdisant tout fonctionnement de l'appareil jusqu'à ce que des mesures sonométriques aient été effectuées ; que M. X a contesté cette décision devant le Tribunal administratif de Marseille qui, par l'article 1er de son jugement en date du 3 juin 2004 dont M. X relève appel, a rejeté cette demande ;

 

 

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

 

 

Considérant qu'aux termes de l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales : La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment :…2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que…les bruits, y compris les bruits de voisinage…qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique… ;

 

 

Considérant que suite à des plaintes de riverains relatives au bruit occasionné par le fonctionnement de l'éolienne anti-gel installée le 2 mars 1999 par M. X pour protéger ses vergers des gelées printanières, le maire de Venasque a, le 25 mars 1999, pris un arrêté interdisant tout fonctionnement de cette installation jusqu'à ce que des mesures sono-métriques aient été effectuées ;

 

 

Considérant en premier lieu que les dispositions alors en vigueur des articles R.48-1 et suivants du code de la santé publique avaient pour objet d'établir les sanctions encourues par les personnes qui, dans les conditions et circonstances qu'elles définissent, étaient à l'origine de bruits dépassant certains seuils et non de réglementer les conditions d'exercice d'activités professionnelles qui, tel que le fonctionnement d'une éolienne anti-gel, sont de nature à entraîner de tels bruits ; que, par suite, la circonstance que le rapport de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de Vaucluse en date du 31 mars 1999 a conclu qu'au regard des mesures sono-métriques et de la réglementation en vigueur le bruit produit par le fonctionnement de l'éolienne constituait une nuisance pour les personnes résidant à proximité ne pouvait, à elle seule, fonder une décision du maire prise dans le cadre de ses pouvoirs de police de la tranquillité publique ;

 

 

Considérant en second lieu qu'il ressort des pièces du dossier que les nuisances à l'origine de l'arrêté litigieux étaient limitées à quelques jours dans l'année, sur une partie de la commune à vocation agricole, et dans des conditions climatiques hivernales impliquant normalement la fermeture des fenêtres des habitations la nuit ; que, de surcroît, la décision ne comportait aucune limite précise d'exécution dans le temps ; que la mesure querellée a ainsi excédé les restrictions que le maire pouvait légalement imposer sur le fondement des dispositions précitées de l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales et porté une atteinte excessive à la liberté du commerce et de l'industrie ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision administrative ;

 

 

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

 

 

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

 

 

Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions précitées de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner la commune de Venasque à payer à M. X la somme de 1 000 euros qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

 

 

Considérant que les dispositions précitées de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la commune de Venasque la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par et non compris dans les dépens ;

 

 

D É C I D E :

 

Article 1er : L'article 1er du jugement en date du 3 juin 2004 du Tribunal administratif de Marseille et l'arrêté en date du 25 mars 1999 du maire de Venasque sont annulés.

 

Article 2 : La commune de Venasque versera à M. Elian X, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

 

Article 3 : Les conclusions de la commune de Venasque aux fins d'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

 

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Elian X et à la commune de Venasque. »